C’est quoi la pair-aidance ?

La pair-aidance, c'est un peu le fait d'être en éclaireur pour l'autre. Lorsque l'on a traversé des choses similaires, ou qui se rapprochent un peu du vécu partagé, il est souvent plus facile d'échanger, de se confier, et de dessiner si ce n'est des solutions immédiates, des horizons.

En somme pour nous, ça désigne un accompagnement où une personne qui se considère comme rétablie de troubles psychiques (même si ce n'est pas aussi simpliste qu'un point de départ et un point d'arrivée), forte de son expérience, soutient celles et ceux qui traversent des difficultés du même domaine. Ce modèle repose sur l’idée que l’expérience vécue peut apporter une aide précieuse dans le rétablissement de chacun, et ça on l'a tous et toutes expérimenté dans notre vie. Certaines fois, parler des grandes problématiques que l'on rencontre dans la vie, c'est plus facile avec quelqu'un qui a connu ces bouleversants sujets. Une séparation amoureuse ou amicale, un deuil, l'enjeu d'un nouvel emploi, un déménagement... L'avoir traversé, avoir compris là où était parfois plus précisément la difficulté ou les enjeux, et en avoir fait un savoir a transmettre, c'est rassurant et véritablement aidant pour l'autre.

Avec l'émergence du concept de pair-aidance, nous avons pu voir fleurir chez Plein Espoir le recours à ce terme, parfois à tort et à travers. En fait nous constatons deux grandes et principales formes de pair-aidance, où la place du savoir expérientiel rentre également en considération : d'une part l’entraide entre pairs, plus informelle et basée sur des échanges d’expérience, et d'autre part la pair-aidance professionnelle, où la personne ayant vécu l’expérience devient un acteur formé et rémunéré pour accompagner ses pairs dans leur parcours.

L’entraide entre pairs : un soutien mutuel

L’entraide entre pairs, c'est celle qui peut nous être la plus familière, car nous l'avons plus ou moins expérimenté lors de partages d'expériences auprès de nos proches. Elle désigne des échanges réciproques entre personnes ayant vécu des expériences proches en terme de vécu, de manière objective mais également subjective. Il s'agit d’un soutien informel, fondé sur la solidarité et le partage d’expériences, plutôt que sur un accompagnement professionnel. Ce modèle crée des liens d’égalité et une atmosphère de non-jugement, chaque participant étant à la fois soutenu et soutenant.

S'il n'est pas aussi formalisé que son pendant professionnel, on le voit s'incarner sous de multiples formes. Groupes de paroles thématique, forums en ligne ou autres espaces où des personnes partageant des troubles similaires échangent sur leurs ressentis, défis quotidiens et stratégies efficaces. L’objectif est de briser l’isolement, d’offrir un soutien mutuel et de privilégier l’expérience vécue plutôt que les théories académiques, même si ces deux faces ne s'excluent évidemment pas.

Ce modèle renforce la notion de "récupération collective", chaque échange apportant espoir et perspectives d’amélioration. Il est présent dans des groupes d’entraide mutuelle (GEM), des associations d'entraide entre personnes concernées par un trouble psychique et/ou leurs proches ou encore sur des plateformes en ligne. C'est ainsi une porte d'entrée parfois plus simple à ouvrir, pour commencer à parler de ce qu'il se passe dans sa chair et dans sa tête, alors que l'on peut être ballotté rapidement entre différents professionnels, ou se retrouver en errance thérapeutique dans des questionnements qui recouvrent la réalité d'une maladie supposée, de traitements meilleurs qu'un autre... mais qui n'aident pas fondamentalement à recouvrer de la confiance en soi. Aller vers la pair-aidance c'est également pouvoir se permettre de partager ce que l'on ressent, accompagné par des personnes qui nous aiderons à mettre des mots, mieux identifier ce qu'il se passe à l'intérieur de nous lorsque la tempête gronde et que même les émotions, douleurs, joies deviennent difficiles à verbaliser. Le rôle des groupes informels de soutiens n'est pas non plus à négliger lorsque l'on a affaire à un monde professionnel certaines fois plutôt versé dans un savoir académique, qui peut rentrer en confrontation avec notre vécu. Ces groupes et ces pari-aidants connaissent également bien les lieux de soins et d'accompagnement orienté rétablissement, où l'on peut aller en confiance vers une posture d'écoute et de prise en compte de nos enjeux en tant que personne, et pas uniquement en tant que malade.

La pair-aidance professionnelle : un accompagnement structuré

À côté de l’entraide entre pairs plus informelle, la pair-aidance professionnelle émerge également depuis quelques années. La différence peut-être d'abord fait par la rencontre de pair-aidants qui sont spécifiquement formés pour nous accompagner, et que l'on rencontre notamment dans des structures de structures de soin et d’accompagnement. Un pair-aidant professionnel est une personne rétablie vivant avec un trouble psychique, qui a suivi une formation spécifique pour devenir un accompagnant qualifié. Contrairement à l’entraide entre pairs, où les échanges sont spontanés et basés sur un savoir expérientiel qui n'est pas forcément théorisé, le pair-aidant professionnel exerce un rôle d'accompagnement structuré, souvent dans le cadre d'un établissement de santé, social ou médico-social. Le choix de se professionnaliser et de devenir pair-aidant est un acte mûrement réfléchi qui permet d'occuper souvent une place particulière, de lien et d'accompagnement entre les personnes dites malades ou concernées par des troubles psychiques et des univers qui paraissent parfois encore trop étrangers. Ce rôle d'intermédiation entre l'Autre et soi-même doit permettre de mieux faire passer ses désirs, ses besoins et de se sentir mieux compris et soutenu.

La pair-aidance professionnelle nous permet ainsi de partager son expérience vécue de manière encadrée et formelle, tout en respectant un cadre éthique et professionnel. Le pair-aidant, qu’il soit salarié ou bénévole, se base sur son savoir expérientiel pour aider d’autres personnes en souffrance, mais aussi pour faciliter l’accès aux soins et mieux appréhender le parcours de rétablissement.

Les rôles des pair-aidants professionnels varient, mais ils incluent souvent lorsqu'ils nous accompagnent :

• Accompagnement individuel : Le pair-aidant peut travailler directement avec une personne concernée, en lui apportant un soutien et en l’aidant à adopter des stratégies concrètes pour faire face à ses difficultés.
• Groupes de parole : Ils peuvent (co) animer des formations, groupes de discussion ou des espaces de rencontre où les personnes concernées peuvent échanger sur leurs expériences dans un cadre sécurisé et bienveillant.
• Médiation dans les soins et les accompagnements : Les pair-aidants peuvent aussi jouer un rôle de médiation entre les personnes concernées et les professionnels, facilitant la communication et permettant de mieux comprendre les attentes et besoins de chacun.

Le pair-aidant professionnel bénéficie d'une formation spécifique et diplômante (comme le diplôme de médiateur de santé-pair ou des formations universitaires spécialisées). Cela leur permet d’intégrer des établissements de soin et d'accompagnement et d’être éventuellement rémunérés pour leurs interventions. Quelques formations ont vu le jour ces dernières années, et nous voyons même émerger des formations dédiées sur la pair-aidance familiale par exemple.

Pourquoi la pair-aidance peut être bénéfique ?

Que ce soit dans le cadre de l’entraide entre pairs ou de la pair-aidance professionnelle, l’approche repose sur l’expérience partagée. Dans les deux cas, la personne qui aide a vécu des difficultés liés à des sujets proches de celle qu’elle accompagne. Cette authenticité et ce savoir expérientiel favorisent une relation de confiance, parfois difficile à établir dans un cadre purement médical ou thérapeutique, mais qui peut le compléter efficacement. Lorsque l'on établie une relation avec un pair-aidant, on a pu noter quelques exemples d'aspects bénéfiques y compris sur le court-terme !

• Réduire la stigmatisation personnelle : La pair-aidance aide à déconstruire les idées reçues que l’on peut avoir sur soi-même ou sur sa situation.
• Renforcer la résilience : En partageant des stratégies qui ont fonctionné pour eux, les pair-aidants peuvent nous aider à développer des outils pour faire face aux défis.
• Améliorer la confiance en soi : Être écouté et compris permet de se sentir valorisé et capable de surmonter les obstacles.
• Accélérer le rétablissement : En aidant à mieux comprendre son trouble et en facilitant la mise en place de "routines" adaptées, les pair-aidants jouent un rôle clé dans le processus de rétablissement.

Comment trouver du soutien et échanger avec des pairs ?

Les formes d’entraide entre pairs sont multiples et accessibles à tous :

• Associations d'entraide
  Les associations d'entraide par et pour les personnes concernées par les troubles psychiques et leurs proches proposent des espaces d’écoute et de partage, permettant de rencontrer d’autres personnes confrontées à des problématiques similaires. Elles offrent des permanences sur place, des groupes de parole ou des activités collectives. Certaines structures organisent également des permanences téléphoniques ou des forums en ligne pour échanger à distance.
• Groupes d’Entraide Mutuelle (GEM)
  Les GEM sont des lieux d’entraide gérés par des personnes vivant avec des troubles psychiques. Ils favorisent la convivialité et l’inclusion à travers des activités collectives, permettant ainsi de créer des liens tout en soutenant le rétablissement.
• Plateformes digitales et communautés en ligne
  Des communautés virtuelles permettent aux personnes confrontées à un trouble psychique de se soutenir mutuellement, souvent de manière anonyme. Ces espaces d’entraide se trouvent sur des forums ou des groupes sur les réseaux sociaux, offrant un lieu d’échange pour ceux qui souhaitent partager leur vécu.

Parmi les associations et plateformes digitales dédiées à la pair-aidance : ESPER PRO, le Collectif Conseil d’Entraide Vivre, la Fondation L’Élan Retrouvé, qui développent des dispositifs spécifiques pour l’accompagnement par des pair-aidants.